Beschrijving

Lettre autographe signée de Hermann Keyserling – Rayküll (Estonie), 23 juin 1920

Rare lettre de quatre pages in-8, à en-tête « Rayküll, Rappel, Estland », signée de la main du philosophe germano-balte Hermann Graf von Keyserling (1880–1946).

Keyserling, alors en pleine réflexion après la Grande Guerre, y développe une méditation saisissante sur la « renaissance spirituelle de l’Allemagne » malgré les apparences politiques de l’après-Versailles. Il évoque sa prophétique analyse de 1915 publiée dans le Hibbert Journal et compare le monde de 1920 à une époque fondatrice « comme il y a deux mille ans ».

Bel état d’ensemble, encre bien lisible malgré une écriture cursive rapide. Document historique majeur illustrant la pensée de l’auteur du Journal de voyage d’un philosophe et fondateur de la « Schule der Weisheit » de Darmstadt.

Dimensions : Un feuillet de 13,5 cms sur 17 cms pliée en deux dans le sens de la hauteur pour former deux feuilles de 13,5 cms sur 17 cms. Papier fin et fragile. Ecrite recto/verso des deux feuilles sur papier à en-tête de son domaine familial en Estonie. Une soixantaine de lignes à l'encre noire. Très belle signature.

Etat ; bon voire très bon. Le papier est un peu cassant : manques aux deux angles supérieurs sans atteinte au texte, manque en haut de la pliure centrale avec quelques lettres disparues mais sans que cela compromette la compréhension.

Contenu : Ici, le texte est dense, philosophique, et fait directement référence à la situation de l’Allemagne d’après-guerre et à ses écrits de 1915. C’est un contenu fort et daté de 1920, l’année même où il fonde sa Schule der Weisheit.

Transcription approximative car la lettre est en anglais d'une écriture difficile à déchiffrer et la traduction française en pâtit. Elle est donc à prendre avec précaution et distance même si, je pense, l'essentiel est correct . Les principales réflexions de l'auteur étant là. Vous pouvez vous essayer à votre tour et vous trouverez certainement des erreurs. Donc traduction à prendre avec précaution.

RAYKÜLL,
RAPPEL,
ESTLAND.
June 23. 1920

My dear Brown,

My wife has transmitted to me here, where I am staying – a landlord no longer, but the tenant of the State, experimenting with no compensation but missing cows – some weeks in order to put order into the remnant of my affairs, the chief contents of your letter, accompanying the returned Baltic article. Let me express to you my frank surprise as to your view of the matter. Certainly both parties were not consciously fighting for ideals, but they were …

Pages 2–3
… deep from human consciousness, and to its perfections in due end. What arguments are there? The result in fact is nothing but a puppet or marionette play which in its deep is full of the biggest moral drama. Thus the argument of France (and these had no weight) that Germany was – but the latter’s – Germany could not have … This was feeling, a certain to rise on the plane of a new spiritual consciousness, as that 2 x 2 = 4. You just look at my article “On the meaning of the war,” published in the Hibbert Journal of April 1915 (with an October 1915 note) how all my essential prophecies … fulfilled. How much of truth? than we do as far as the lost Antelude (paper goes, they are … as I have stated then too. … people realize this or not, that for the very nearer a wonderful rise of Germany is begun even now, in spite of rude appearances to the contrary. I do but one instant; if much of the difficulty of things and any break is equal to do, as a matter of fact French letters … of past years and on the contrary there never was a similar holding junction for German books, now men in Germany – and young so stick always; all … terribly during a truly … book to read, now 4000 copies will never lie in … to all really serious books. Of now the reality of the world does not always coincide with …

Page 4
outward appearances. It now does less than it does today. We are at the beginning of the world-war’s end. Germany being reborn, dying, rising in the East, an age of construction is forthcoming. I am myself of that the same will prove to be as critical as what that of 1914. Yet it is a wonderful time to live now, as it was some 2000 years ago.

I’ll be back at Friedrichshof in about a fortnight, settle at Darmstadt in September,

Sincerely yours
Hermann Keyserling

(quelques mots restent indéchiffrables – la graphie est parfois très serrée et hâtive)


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Traduction française

RAYKÜLL,
RAPPEL,
ESTLAND.
23 juin 1920

Mon cher Brown,

Ma femme m’a transmis ici, où je séjourne – non plus comme propriétaire terrien mais comme simple locataire de l’État, expérimentant sans autre compensation que quelques vaches disparues – depuis neuf semaines, afin de mettre un peu d’ordre dans ce qui reste de mes affaires, les principaux éléments de votre lettre qui accompagnait le retour de l’article sur la Baltique. Permettez-moi de vous dire ma franche surprise devant votre point de vue sur la question. Certes, les deux partis ne combattaient pas consciemment pour des idéaux, mais ils étaient…

… portés, du plus profond de la conscience humaine, vers sa perfection inévitable. Quels arguments peut-on opposer à cela ? Le résultat n’est en fait rien d’autre qu’un jeu de marionnettes qui, au fond, recèle le plus grand des drames moraux. Ainsi l’argument de la France (et ces arguments n’avaient pas de poids) selon lequel l’Allemagne était… mais l’Allemagne ne pouvait pas… C’était un sentiment, une certitude de s’élever au plan d’une nouvelle conscience spirituelle, aussi évident que 2 × 2 = 4. Regardez donc mon article « Sur le sens de la guerre », publié dans le Hibbert Journal d’avril 1915 (avec un addendum en octobre 1915) : toutes mes prophéties essentielles s’y trouvent réalisées. N’y a-t-il pas là une part de vérité ? … Qu’on le réalise ou non, une admirable renaissance de l’Allemagne a déjà commencé, et cela en dépit des apparences grossières contraires. Je ne doute pas un instant que, si difficiles que soient les circonstances, toute rupture apparente n’empêche pas, en réalité, un renouveau intellectuel. Les lettres françaises des années passées … tandis qu’en Allemagne il n’y a jamais eu de période comparable où l’on lise et médite avec autant d’intensité les ouvrages sérieux.

Les apparences extérieures ne correspondent pas toujours – et aujourd’hui encore moins – à la réalité du monde. Nous sommes au commencement de la fin de la guerre mondiale : l’Allemagne est en train de renaître, mourant et ressuscitant à l’Est, une ère de construction s’annonce. Je suis convaincu que la période qui s’ouvre sera aussi décisive que celle de 1914. C’est une époque merveilleuse pour vivre, tout comme il y a deux mille ans.

Je serai de retour à Friedrichshof dans une quinzaine de jours, puis je m’installerai à Darmstadt en septembre.

Bien à vous,
Hermann Keyserling


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Commentaire sur le contenu et le ton

Contexte : Écrite en juin 1920, à peine deux ans après l’armistice de 1918 et le traité de Versailles (juin 1919). L’Europe se reconstruit dans une atmosphère politique et morale troublée.

Ton : Philosophe et presque prophétique. Keyserling emploie un vocabulaire spirituel (« nouvelle conscience », « drame moral », « renaissance de l’Allemagne »). Il se détache des simples événements politiques pour voir une signification plus large, quasi métaphysique.

Message : malgré la défaite et les apparences « grossières », il entrevoit une résurrection culturelle et spirituelle de l’Allemagne. C’est à la fois une observation et une anticipation du rôle intellectuel que le pays pourrait retrouver.


Qui est Hermann Keyserling ?

Hermann Graf von Keyserling (1880–1946) : philosophe et essayiste germano-balte.

Issu d’une famille aristocratique de l’actuelle Estonie (alors Empire russe).

Après la Première Guerre mondiale et la perte des domaines familiaux (Rayküll), il voyagea beaucoup et s’installa finalement en Allemagne.

Fondateur en 1920 du « Schule der Weisheit » (École de la Sagesse) à Darmstadt, un cercle intellectuel influent dans l’entre-deux-guerres.

Son livre le plus connu : Das Reisetagebuch eines Philosophen (Journal de voyage d’un philosophe, 1919), qui le rendit célèbre dans le monde germanophone.

Pensée marquée par une vision spirituelle de l’histoire et la quête d’une sagesse universelle.



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